C’est un sentiment. C’est pas facile à décrire. Je ressens la chaleur, je m’ouvre à ce sentiment. Mon cœur est touché, tellement touché que je pleure. Je ressens aussi une tristesse. (Je ne sais pas d’où elle vient, mais elle est là.) Et puis une partie de ce sentiment est un choc. J’ai la sensation que mon cœur tremble légèrement. Le choc suite à une nouvelle tragique et lumineuse. La mort d’un bébé et sa naissance en même temps. C’est comme si mon cœur avait compris quelque chose (que je ne sais pas exprimer par des mots). Je me débats contre moi-même, ressentant chaleur et tristesse en même temps. Il faut que je m’agrippe à la table pour ne pas perdre l’équilibre. Je suis émue, bouleversée. Des vagues de sensations et surtout d’illumination.
tristesse
Bonjour tristesse
Ce qui m’attire, en partie, est ta tristesse. Elle s’est inscrite dans ton corps. Dans ton regard habituel. Tes sourcils qui tombent, tes yeux baissés. Dans ta voix vibrante. Tu sembles incroyablement triste. On est attendri quand on te voit. J’imagine ce qu’ont ressenti tes profs au lycée. De bonnes notes malgré le retard et le manque de participation, t’avais raconté. Voulaient-ils te protéger ? Te soulager ? Sans franchir la frontière de la discrétion qu’établit l’intimité de ta tristesse?
T’sais, à l’époque, j’avais ce petit ami qui était submergé par la tristesse. Je crois que j’étais attirée par cette douleur. Par l’incomplet dont je pouvais contribuer à le compléter. J’ai aimé lui apporter de l’aide. Je me suis sentie valorisée. Dans ce sens, je l’aimais. Sans savoir qui il était à part sa douleur. Trois ans après notre rupture, il me dira qu’on n’avait rien à se dire et qu’on le remarquait les deux de temps en temps. Que j’étais quasiment sa thérapeute, peut-être pour me fuir de moi-même. Il y a cette hypothèse que ce besoin de faire sortir les gens de leur tristesse vient de chez moi, de cette volonté puissante d’en faire sortir ma mère. J’en sais rien. Peut-être, cette attirance par la tristesse s’arrêtera jamais. Justement, j’apprends doucement que je vais pas la soigner. Que je te la laisse, ta tristesse.